1. Genèse de la présence en Afrique et au Congo 

L’Afrique, à ses débuts, était un canton de l’empire romain, correspondant, à la Tunisie actuelle. Puis, l’Afrique désigna toute l’Afrique du Nord actuelle. Au-delà du Sahara qui se désertifia progressivement, c’était  » terra incognita « . Au 15ème Siècle, de hardis navigateurs portugais comme Diego Cao et Vasco de Gama découvrirent les côtes occidentales et sud -orientales. Mais le centre du continent resta  » terre inconnue « , sauf sur la côte d’Angola, le Royaume du Kongo. Ce premier contact avec l’évangile fut appelé  » première évangélisation  » qui tourna court surtout à cause de la traite esclavagiste. La 2ème évangélisation quant à elle, va signer son début au Congo peu avant le découpage de l’Afrique à la Conférence de Berlin de 1885. Par un décret du 9 septembre 1865, le Saint-Siège confia à la Congrégation des Pères du Saint-Esprit la charge d’évangéliser le Congo et le 25 mars 1878, celle d’évangéliser le centre africain. La fondation de la mission de Boma, dans le Bas-Congo, le 12 mai 1880, par cette même Congrégation, marquera le début de cette deuxième évangélisation dans l’ensemble du pays. Une autre circonstance, non moins importante, est l’octroi de cette portion de territoire à l’  » Association Internationale du Congo  » présidée de 1877 à 1884 par le Roi Léopold II. Ce qui était  » Association Internationale du Congo  » se fera reconnaître par les Puissances, lors de la Conférence Internationale de Berlin de 1885, comme Etat souverain ayant le statut de propriété privée du Roi Léopold II et prendra le nom de  » L’Etat indépendant du Congo « . Très tôt déjà, le Roi Léopold II sollicitait vivement le secours du Saint-Siège et surtout des Congrégations missionnaires avec des garanties toutes spéciales aux premiers missionnaires qui accepteraient de travailler au Congo :  » défense des intérêts de l’Eglise, voyage gratis, établissement au Congo gratis, et un traitement annuel qui cependant ne dépendra pas du gouvernement mais de la Propaganda « . Ainsi le premier contingent des missionnaires de Scheut s’embarquait le 26 août 1888 à Anvers pour le Congo. Les missionnaires de Scheut n’étant pas en nombre pour couvrir cet immense territoire, le Roi fera appel aux Jésuites qui arriveront au Congo en 1893. Dans la foulée, on aura les Trappistes de Westmalle, les Prêtres du Sacré-Cœur, les Rédemptoristes et ainsi de suite… ayant tous la même mission  » Civilisatrice et évangélisatrice à accomplir dans ce nouveau territoire « . Par le biais des missionnaires, un effort sera entrepris d’équiper le pays en institutions scolaires et sanitaires. La mission étant de taille, le nombre en personnel ne suffisait pas pour répondre à un tel besoin. Pour les Jésuites, la Préfecture du Kwango était érigée en Vicariat apostolique du Kwango en 1928. Les nombreuses lettres de demande du renfort en personnel n’ayant pas de suite favorable, Mgr Van Hee, nouveau vicaire apostolique du Kwango, ne tarda pas à se tourner vers les Oblats de Marie Immaculée de la Province de Belgique dont il connaissait l’intention de venir au Congo. B. Les tractations oblates Le père Cyprien Delouche, français d’origine et premier provincial de la nouvelle Province oblate implantée en Belgique en 1905, eut très tôt l’idée d’envoyer des Oblats au Congo. Comme il fréquentait la haute bourgeoisie et les proches du Roi, il connaissait biens les intentions du Roi et les avantages dont jouissaient les missionnaires. Cependant, il dut renoncer à l’idée à cause des attaques acerbes dont faisaient l’objet les projets du Roi au Congo et avec la construction de la Basilique de Koekelberg, en Belgique, qu’on qualifiait d’être construite avec le sang des congolais. En 1906, le Conseil général parle d’un projet de mission au Congo qui aurait été accepté par le Très Révérend père Cassien Augier, Supérieur général de la Congrégation, sur demande du Roi Léopold II. Toutefois, cette idée ne put être matérialisée par manque de personnel disponible et préparé pour affronter le dur climat de l ‘Afrique centrale et la mentalité hostile et barbare de certaines tribus. Plus tard, Mgr Dontenwil, Supérieur général des Oblats, après avoir analysé et évalué les enjeux de cette aventure missionnaire au Congo, soumit la proposition à la Sacrée Congrégation dans sa lettre du 26 février 1931. Pour ratifier la demande de la commission des Jésuites chargée de ces tractations, et les accords conclus entre les Oblats et les Jésuites, le cardinal Van Rossum, préfet de la Propagande, dans sa lettre du 5 mars 1931, répondra en ces termes à Mgr Dontenwil :  » Je m’empresse de vous faire savoir que cette Sacrée Congrégation de la Propagande est très heureuse d’accorder la permission demandée et forme les vœux les plus ardents pour que les pères de votre Institut, si méritants dans l’œuvre missionnaire, puissent recueillir dans ce nouveau champ d’abondants fruits de salut. Les pères mentionnés travailleront pour le moment sous la dépendance du Vicaire apostolique du Kwango. Ensuite, quand le nombre des missionnaires sera plus grand et que les œuvres seront plus développés, on songera à ériger une nouvelle mission à confier aux pères de la Province de Belgique de votre Institut « . Le Supérieur général va répercuter cette décision au Provincial de la Belgique, le père Praet qui, à son tour, la transmettra aux Oblats de sa Province dans une lettre du 10 mars 1931 :  » Depuis plusieurs mois, vous avez entendu parler des démarches commencées, il y a un an et demi, par mon prédécesseur le père (Lucien) Pescheur, avec l’approbation du conseil provincial, en vue d’obtenir au Congo Belge un nouveau champ d’apostolat pour nos pères et frères de la Province Belge. Depuis un an, nous les avons poursuivies avec l’approbation de son Excellence Révérendissime Mgr Dontenwil, Supérieur général, et son Conseil. La providence nous donne la joie de pouvoir vous annoncer aujourd’hui l’heureuse issue… L’accord s’est fait aisément sur les modalités de notre concours et sur les limites du territoire dont l’évangélisation nous serait confiée… Je ne doute pas que ces heureuses nouvelles vous excitent à travailler avec un nouveau courage à étendre le bon renom de notre chère Congrégation.  » II. Implantations 1. L’arrivée des pionniers Dans la partie du Vicariat cédée aux bons soins des Oblats, le champ était déjà défriché et le sol préparé par les Jésuites qui avaient fondé trois stations. Une première située au Nord : Ipamu (1922), une deuxième au Centre, Mwilambongo (1926) et une troisième au Sud, Kilembe (1923).  » Les missionnaires travaillent sans relâche à l’œuvre du relèvement moral et matériel des indigènes. Leurs résultats sont manifestes dans la lutte contre la polygamie, la superstition et les mœurs barbares du milieu indigène. A l’occasion de l’évangélisation, les missions nationales contribuent à la formation d’artisans de couleur dans les métiers les plus divers : menuisiers, charpentiers, maçons, peintres, tanneurs, vanniers, cordonniers, tailleurs, relieurs, tuiliers, briquetiers, mécaniciens, cultivateurs, etc.  » Le premier missionnaire Oblat à fouler le sol congolais fut un vétéran venu de Basutoland (actuel Lesotho), le père Eudore Hubert.  » Parti du Basutoland le 19 juin 1931, le père Eudore Hubert atteignit la mission Ipamu par le port de Mangaï (à 15km d’Ipamu), le dimanche soir, le 12 juillet de la même année. Il fut accueilli par les Jésuites Yvon Struyf, Van Tilborg, un scolastique, Victor Mertens, et un aide laïc. Le 24 juillet 1931, il se rendit à Mwilambongo avec le père Biebuyck s.j. de la communauté de Mwilambongo, mais qui résidait à Impanga. C’était pour se rendre compte, sur place, de l’état de la mission qu’ils hériteront des Jésuites. Il ne put visiter Kilembe parce que son compagnon craignait de traverser la région des Bapende à cause de la révolte des Bapende à Kilamba, de mi-septembre 1931 lors de laquelle M. Max Ballot trouva la mort, le 15 mai 1931. Les deux rapports d’Eudore Hubert sur Ipamu et Mwilambongo montraient à suffisance que les Oblats avaient du pain sur la planche. Le travail était copieux et il fallait du renfort en personnel.  » En fait du renfort, les pères Edmond Renson et Jean Baptiste Adam s’embarquaient le 2 septembre 1931 au port d’Anvers pour atteindre Ipamu le 30 septembre de la même année. Le père Joseph Picard atteignit Ipamu le 9 janvier 1932 et sera conduit à Mwilambongo le mardi 12 janvier 1932 étant donné que le père Biebuyck s.j. devait quitter Mwilambongo le 23 février 1932. En juillet 1932, un autre contingent non moins important d’Oblats arrivait au Congo. Il s’agit des pères : Dieudonné Novalet, François Nizet, Louis Simon, Charles Simon, le scolastique Xavier De Ville et le frère convers Gérard Pison. Le 22 septembre 1933, le père Alphonse Bossart arrivait de Basutoland pour renforcer les rangs. Voici la répartition de onze Oblats sur le nouveau territoire de mission : Ipamu : Eudore Hubert, Jean-Baptiste Adam, Dieudonné Novalet et le frère Gérard Pison. Mwilambongo : Joseph Picard, Alphonse Bossart, François Nizet, Louis Simon et le scolastique Xavier De Ville. Kilembe : Edmond Renson et Charles Simon

2. Fondation des missions de 1931 à 1960

A partir de ces trois postes pré-existants, les Oblats vont rayonner non seulement pour étendre la mission civilisatrice et évangélisatrice mais aussi pour contrecarrer l’influence protestante dans la région. On aura donc deux catégories de mission suivant les raisons citées ci-dessus. D’Ipamu, on fonda Mateko en 1935 avec Charles Simon. De Mwilambongo, on fonda Ngoso en 1935 sous la direction de Dieudonné Novalet, Koshimbanda en 1936 sous la direction d’Hubert Jetzen. Le 13 avril 1937, la Mission d’Ipamu sera érigée en préfecture apostolique d’Ipamu avec l’adjonction du territoire civil de Basongo à l’Ouest et de Njadi à L’Est ; elle fut confiée à Mgr Bossart comme Préfet apostolique. La partie de Basongo cédée par les missionnaires de Scheut avait une mission existante du nom de Brabanta, elle sera confiée à Eudore Hubert, tandis que dans la partie Nord-Ouest, on héritait de Mateko sous la direction de Charles Simon. De Brabanta, les Oblats ont fondé, deux ans plus tard, Banga-Banneux le 1er mai 1939 pour enrayer l’influence protestante de Ndjoko-Punda et de Nyanga. La direction de la mission fut confiée à Edmond Renson. Une première rupture en personnel interviendra à cause de la guerre de 1940-1945. Après la guerre, les Oblats René Oger et Roger Vivier vont s’atteler à fonder Laba Central -Laba Mfinda) en 1945, par ailleurs Joseph Lannoy et Jules Pirson, Mikope en 1947. Entre-temps, la préfecture deviendra Vicariat apostolique le 12 février 1948, toujours sous la houlette du même Mgr Alphonse Bossart. Le nouveau vicariat comptait alors un effectif de 43 prêtres, 3 vaillants frères convers, un frère scolastique et un évêque. Le petit séminaire, qui avait ouvert ses portes en 1946 à Ipamu, sera bientôt transféré à Laba et accueillera ses petits séminaristes dans ce nouveau site le 16 septembre 1948. Pleins de zèle, ils vont continuer à fonder Idiofa (1949) par Joseph Picard, Mutoy (1950) par Remy Delaite, Mangaï I (1950) par Xavier de Ville, Kimputu (Béthanie 1950) par Alex Baetens et Mokala en 1950 par Hubert Jetzen. Ifwanzondo fut d’abord poste secondaire de Mwilambongo en 1945 par Jacob Maes puis construite comme mission en 1950 par Maurice Pilon et deviendra la maison provinciale le 5 décembre 1951. Jean-Baptiste Adam l’avait voulu ainsi lorsqu’il était nommé supérieur religieux du Vicariat en 1948 et surtout pour ne pas créer la confusion avec l’évêque qui dirigeait le même personnel sur le plan pastoral. Le noviciat ouvrit ses portes aux jeunes congolais le 8 septembre 1954. Le père Dieudonné Novalet, ancien supérieur du Séminaire de Laba, était désigné comme maître des deux novices : Vincent Kasay et Louis Mbwôl. Belo fut fondée comme mission en 1954. En 1955, Intswem par Charles Rommens, puis Kalo, Mwembe, Mbeo-Ishwi, Ngashi. En 1957, Lashim. Musenge Bawongo et Mangaï II en 1958. Laba-Lakas et Banda en 1959. Le 11 mai 1958, avec le sacre de Mgr René Toussaint, celui-ci va succéder à Alphonse Bossart. La même année, le siège du Vicariat apostolique sera transféré d’Ipamu pour Idiofa situé au centre. Mgr René Toussaint, depuis longtemps inspecteur des écoles, avait une bonne connaissance sur la réalité de l’ensemble du Vicariat.  » Le choix de cette résidence comme siège du Vicariat se justifie du fait qu’Idiofa se trouve au centre du Vicariat ; c’est également le chef-lieu du territoire et le centre pour toutes les communications. Ipamu avait été choisi comme centre au moment où tous les transports et les communications se faisaient par bateau (fleuve Kasaï). Cette mission a perdu beaucoup de son importance du fait qu’elle a engendré 6 nouvelles fondations et elle ne compte plus actuellement qu’une population totale de 12.000 habitants. Le centre d’Idiofa est le plus populeux du Vicariat  » (A.G.O.R. Rapport 1957-1958). En plus de cela, Mgr Toussaint avait hérité d’un diocèse de 80 prêtres, 12 frères convers dont 7 européens et 5 congolais, 6 frères scolastiques congolais aux études au Scolasticat de Roma ( au Basutoland). Le Vicariat d’Ipamu deviendra  » Diocèse d’Ipamu  » le 10 Novembre 1959 et puis,  » Diocèse d’Idiofa « , le 20 juin 1960. Le 10 janvier 1960, Paul Macream, devenait le premier prêtre oblat congolais par l’imposition des mains d’un Evêque allemand. Paul a été ordonné avant Vincent Kasay et Louis Mbwôl parce qu’il avait fait ses études philosophiques au grand séminaire de Mayidi. Avant d’aller poursuivre ses études théologiques au Basutoland, il fit son noviciat avec Valentin Mukanda et Célestin Ivami de 1955 à 1956 à Ifwanzondo.

3. De 1960 à 1964 De l’Indépendance à la rébellion

Déjà en 1959, le travail missionnaire était mis à l’épreuve avec la vague des mouvements politiques et religieux qui revendiquaient l’indépendance. Le climat était propice à l’insoumission à tout ce qui était européen. Il fallait à tout prix que le Congo reste aux congolais sur tous les plans. L’homme blanc était considéré par certains comme un véritable obstacle à l’éclosion du développement des congolais. Le complexe d’œdipe. Le blanc était d’une part envié, admiré et d’autre part honni. En 1960, à l’accession du Congo à la souveraineté internationale, avec une classe politique inexperte, naîtra le clivage entre la classe politique et la petite bourgeoisie. A partir de 1961, vont commencer les querelles intestines, la baisse sensible du niveau de vie et les inégalités sociales. Ces frustrations généralisées ne tarderont pas à engendrer des mutineries, des sécessions, des insurrections et des rébellions. Ce mouvement d’insurrection et de rébellion touchera directement les Oblats. La quasi-totalité des missions rasées et pillées et les missionnaires dispersés. Dans la nuit du mercredi 22 au jeudi 23 janvier 1964, trois missionnaires Oblats seront massacrés à Kilembe. Il s’agit des pères Nicolas Hardy, Gérard Defever et Pierre Laebens. Pierre Laebens, procureur adjoint d’Idiofa, se trouvait à Kilembe pour réparer un moteur en panne et une fausse manœuvre avait provoqué un accident qui lui causa la fracture à une jambe. Les rebelles l’ont achevé avec son genou dans le plâtre. Paul Macream, qui était de la même communauté, avait réussi à échapper en sortant en pyjama par la fenêtre pour chercher à atteindre Idiofa à pied après trois jours de marche. Louis Sebreghts avait aussi échappé au massacre parce que se trouvant en brousse dans un village voisin pour la pastorale. Xavier De Ville, qui se trouvait à Ngashi, eut la vie sauve grâce à la protection de ses paroissiens. Pendant ce temps, Mgr Toussaint se trouvait au Basutoland. Après avoir anticipé l’ordination des deux jeunes prêtres oblats congolais : Bonaventure Madiau et Benoît Kabongo, à cause de ce massacre, le 25 janvier 1964, il revint pour prendre la situation en main. Tous les missionnaires de ce temps ont chacun une expérience de cette épreuve. Sur les 30 missions du diocèse, 26 étaient touchées par la rébellion et furent évacuées. Les dégâts subits étaient assez lourds. La rébellion de Mulele venait de donner une bonne leçon à tous : missionnaires, politiciens et population elle-même. Les Oblats étaient évacués une partie dans l’Est du Diocèse (Brabanta) puis dans les diocèses voisins et à Kinshasa, une autre partie en Europe.

4. De 1965 à 1970

Suivit un changement de stratégies à la fin de la rébellion. Les Oblats ont écouté les gens et étudié à fond les causes de la rébellion pour en saisir la vraie portée. L’heure était à l’interrogation et à la recherche des causes profondes en vue de commencer une ère nouvelle dans le diocèse. Au lieu que les chrétiens viennent à la mission centrale, les prêtres vont aller vers les villages pour les aider à se développer en créant les communautés de base, les coopératives et la prise en charge par la population elle-même. Le nombre des missionnaires va decrescendo. Nombreux, découragés et surtout déçus par la rébellion, ne reviennent plus au Congo. Le concile Vatican II avec sa nouvelle façon de vivre  » La mission et l’Eglise  » va accentuer la crise chez de nombreux prêtres. On constata des sorties en cascade tant du côté européen que congolais. Beaucoup de missions seront abandonnées et certaines cédées aux prêtres diocésains qui augmentaient en nombre. Le père Jean Drouart, dans le rapport de sa visite canonique de 1966-1967, disait :  » Les événements ont eu une répercussion sur le personnel missionnaire. Les 88 prêtres Oblats, tous européens, de 1959, ne sont plus que 66 : 17 obédiences pour tout le Congo, ont été données entre-temps, mais il eut 28 départs et 11 décès, soit une diminution de 22 « . Il est vrai, poursuit-il, que dans le même temps, la jeune chrétienté d’Idiofa a continué à donner un nombre croissant de prêtres à l’Eglise. En 1959, il y avait 9 prêtres séculiers du pays, la plupart encore jeunes. Actuellement ils sont 16 (après la mort de l’abbé Lankwan en 1965) que leur expérience et leur qualification mettent à même d’assumer leurs responsabilités dans le diocèse.  » (p.7 ) Fondation de Lozo en 1966 reste l’un des rares cas de mission fondée pendant cette période. La préoccupation majeure était la reconstruction de ce qui était détruit et la dotation de la population de moyens adéquats pour leur bien-être. Le lancement du mouvement  » Progrès populaire  » qui deviendra par la suite  » Développement Progrès Populaire « . Ce mouvement est né non pas des cendres du mouvement initié par Flavien Mbelabuni à Laba en 1961. Le père Jean-Marie Ribaucourt s’étant inspiré de cela, lancera le mouvement Progrès populaire en janvier 1965 à la demande de Mgr Toussaint. Du côté oblat, on s’attela non seulement à reconstruire les décombres, mais on entreprit un sérieux travail de construction d’une maison de retraite d’Ifwanzondo en 1967 pour le ressourcement spirituel et les rencontres au diocèse. Un bon nombre de jeunes missionnaires arriva de la Belgique et seront répartis dans des missions. Ils seront regroupés surtout à Ipamu, Mwilambongo et à Intswem, chacun avec son rayon d’action. Ce fut aussi le moment où les mercenaires Jan Schramme et Bob Denard avaient occupé l’Est du Congo. En 1968, le père Gérard Delbeke, à peine arrivé à Mwilambongo et qui balbutie encore son kikongo, fut arrêté et conduit à Idiofa comme un mercenaire par des militaires zélés. Il garde encore les séquelles de cette journée passée sous la bonne garde des militaires congolais. En mai 1968, Mgr Toussaint jugea que l’Eglise d’Idiofa avait atteint une certaine maturité et que l’heure avait sonné de céder le flambeau aux africains. Un acte de bravoure et de confiance alors qu’il n’avait pas l’âge canonique et n’avait pas de raisons de santé à avancer pour démissionner.  » Je vous avais dit à Rome que j’estimais que le moment était venu de présenter ma démission de manière à donner à notre jeune Eglise un visage authentiquement africain  » (Baud. p. 136) Le 13 septembre 1970, l’abbé Eugène Biletsi, un jeune prêtre congolais de 36 ans, succédera à Mgr Toussaint à la tête du diocèse d’Idiofa.

5. De 1970 à 1980

Cette période peut être qualifiée de période de vaches maigres sur le plan vocationnel. Le 11 novembre 1972, Makuth, un jeune bandit, voulant s’infiltrer dans la cure de la mission de Mwembe donna un coup mortel au père Charles Rommens qui fut enterré derrière l’église de la même mission. La politique du pays insistait sur l’Etat laïc du pays. La dictature voulait s’affirmer sur toutes les institutions du pays. L’étatisation des écoles, l’inauguration de l’idéologie de recours à l’authenticité avec toutes ses conséquences et ses dérapages sur la vie de l’Eglise. Le prêtre devait s’occuper de la sacristie et se taire sur le plan politique et social. Tout le monde devait chanter et exalter les exploits du président de la République qui seul était le  » sauveur et père de la nation « . C’est le moment pendant lequel les Oblats ont commencé un vrai travail de conscientisation, de lutte contre l’exploitation et la formation des communautés de base. La collaboration avec des assistants laïcs qui avaient suivi une formation pastorale à Kinshasa faisant la force de cette nouvelle méthode. La stimulation des chrétiens à participer activement à la liturgie et la traduction des chants liturgiques en langues locales. Les pères Elie Cambron, Daniel Delabie et Justin Alung s’étaient distingués par leur façon quelque peu originale pour évangéliser dans ce sens. Cela leur a valu non seulement les encouragements de la part de l’Evêque mais aussi la hargne des agents de l’Etat et même les incompréhensions du côté des certains chrétiens qui parfois les considéraient comme des plus grands magiciens ou féticheurs. Vous n’avez qu’à écouter les mythes autour de ces noms-là dans nos villages…

Extrait du texte du Père Valère EKO, omi.